vendredi 31 mai 2013

La couleur des sentiments

Un livre de Kathryn Stocket

Il y a de ces romans que l’on aime lire pour leur qualité, pour leur prose ou pour le défi qu’ils représentent. Et il y a de ces romans, comme l’est La couleur des sentiments, qui nous porte, nous transporte même, en nous faisant vivre une panoplie d’émotions. Des romans que l’on dévore, mais que l’on ne voudrait jamais refermer. Des romans avec des personnages auxquels on s’attache et qui semblent si vrais que l’on peut presque s’imaginer assis à la même table qu’eux, écoutant leur histoire. 


Le récit est tenu par trois narratrices différentes. Skeeter, cette Blanche fraîchement  diplômée de l’université, pas assez jolie pour se marier, mais qui a la distance nécessaire pour réaliser que quelque chose cloche dans le monde parfait de Jackson. Il y a aussi Abileen une bonne tellement attachée aux petits Blancs qu’elle choisi de quitter la famille avant d’assister au moment où les fillettes deviennent comme leur mère. Puis il y a Minny, une autre bonne, dont la langue bien pendue lui cause des problèmes.  

En 1962, les choses semblent vouloir changer dans le reste des États-Unis. Il y a Martin Luther King qui fait les manchettes avec et d’autres activistes. Toutefois, dans une société comme Jackson, où presque personne n’ose parler ni même se questionner Skeeter qui entretient des liens avec l’extérieur, ose poser la question : «Vous n’avez jamais envie de... changer les choses ?» (p.22) C’est ainsi que s’amorce son projet; raconter comment se passe la vie des bonnes qui travaillent pour des familles de Blancs. 

«Elles élèvent un enfant blanc, et vingt ans après l’enfant deviennent leur employeur. Le problème, c’est qu’on les aime, et qu’elles nous aiment, et pourtant... Nous ne les autorisons même pas à utiliser les toilettes de la maison.»(p.151)

La force du récit repose certainement sur cette façon délicate qu’a l’auteure d’insérer des détails historiques sans que cela semble forcer. On ne sent pas ici que Stockett cherche à nous faire une leçon d’histoire. Elle qui a d’ailleurs été élevée par une bonne noire dans les années 1970 à Jackson, Mississippi connait très bien la société qu’elle décrit. Une société dans laquelle la ségrégation est encore solidement ancrée. Il faut dire que presque toutes les familles aisées ont à leur service une bonne Noire. Toutefois, Stockett ne fait pas valoir une morale manichéenne, puisqu’on rencontre des Blanches qui sont si profondément attachées à leur bonne qu’elles veillent à leur confort. Il y a aussi des Noirs qui ont mauvais caractère, ou qui battent leur femme. 

J’ai vraiment aimé ma lecture et je recommande ce roman. Je crois qu’il pourrait plaire à tous. Bien qu’une histoire d’amour se faufile entre les pages, il ne s’agit pas d’un roman à l’eau de rose, mais plutôt d’une histoire sur les sentiments, bons ou mauvais. 

Kathryn Stocket, La couleur des sentiments, Babel/Acte Sud, 2012. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire