vendredi 24 mai 2013

Du domaine des Murmures

Un livre de Carole Martinez

En entamant la lecture du roman de Carole Martinez, « Du domaine des Murmures», je croyais avoir droit à une petite escapade dans un Moyen Âge duquel je me suis éloigné depuis la fin de mon baccalauréat en Histoire. J’espérais avoir ma dose de châteaux, de princesses et de ménestrels romantiques et courtois. 

Pour les châteaux et les ménestrels, j’ai été servi. Le personnage principal, Esclarmonde n’est toutefois pas une princesse, mais bien une recluse, qui offre sa liberté à Dieu, et choisie à l’âge de 17 ans de passer le reste de sa vie emmurée. Sauf qu’Esclarmonde, à l’intérieur de sa prison sacrée, donne naissance à un fils puis découvre que l’amour maternel est bien plus fort que la foi. (Et oui encore une histoire d’amour maternel!) Et cette naissance provoquera son lot de bouleversements dans ce moyen-âge où le mystique et le symbolisme religieux prennent une grande place. Esclarmonde en vient à se révolter à sa façon contre le divin en profitant de la foi sans borne des pèlerins; «j’ai joué avec ces pécheurs inconnus, j’ai trituré des âmes et, à défaut de croire en Dieu, j’ai commencé à croire en moi.» (p. 187) Cependant, cette confiance en elle ne la mènera nulle part, puisque rappelons-nous qu’il s’agit d’une recluse. Ha !

J’ai eu l’impression que l’auteure voulait couvrir trop large, au risque de s’y perdre. À certaines reprises, Esclarmonde, qui est la narratrice du roman, s’adresse directement à nous, lecteur moderne, en murmurant à travers les murs du château. Cet aspect-là n’est pas clair du tout, et c’est sans grande conviction que la narratrice s’adressera à nous. Il y a aussi tout un pan de l’histoire qui relève du fantastique et qui semble être un détour — forcé — utilisé par l’auteure pour présenter ce qui se passe à l’extérieur de la cellule de la recluse. Ainsi, cette dernière voit, en songe, les aventures de son père parti en guerre. J’ai croisé les doigts pour qu’elle se trompe et que ses prédictions ne se réalisent pas, en vain!

Mais cette présence du fantastique, ou du mystique est presque incontournable dans une histoire médiévale, puisque comme le dit la narratrice;  
« le monde en mon temps était poreux, pénétrable au merveilleux. Vous avez coupé les voies, réduit les fables à rien, niant ce qui vous échappait, oubliant la force des vieux récits. Vous avez étouffé la magie, le spirituel et la contemplation dans le vacarme de vos villes.» (p.207) 
En outre, que ce soit la peur de Dieu, la peur du diable, la peur du surnaturel ou encore la peur des croisades, ce sentiment est omniprésent dans la vie des contemporains d’Esclarmonde, ce que l’auteure parvient à rendre tangible tout au long du roman. « La nuit venue, la terre n'appartenait plus ni à Dieu ni aux hommes. À la nuit, les cauchemars s'incarnaient et rôdaient autour des endormis.»(p.204)

C’est somme toute un beau texte et une histoire originale que nous offre Carole Martinez, bien qu'elle s’embrouille et semble finalement passer à côté de quelque chose. Je ne crois pas que ce devrait être le premier roman à ajouter à votre pile de lecture de l’été!

Il s’agit du roman lauréat du prix Goncourt des Lycéens 2011. 

Carole Martinez, Du domaine des Murmures, Gallimard, 2011. 
Également en format poche, chez Folio. 


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