mardi 10 décembre 2013

Canada

Un roman de Richard Ford

Quand les parents de Dell Parson, quinze ans, décident de commettre un vol de banque, celui-ci comprend qu'il doit dire adieu à jamais à son rêve de vivre une vie normale et paisible. Une amie de la famille l'aide à traverser en secret la frontière canado-américaine et le remet entre les mains d'un autre Américain en exil, Arthur Remlinger, qui sous ses airs pacifiques cache une nature d'une redoutable violence. Dell tente de retrouver son équilibre sous les ciels immenses de la Saskatchewan et de découvrir un sens à la conduite des adultes qu'il aimait et qu'il croyait connaître. 
Richard Ford révèle de façon magistrale la violence et le désordre moral qui se cachent sous la surface lisse du rêve américain. À travers les yeux de Dell, nous découvrons la complexité et l'ambiguïté du monde, que la culture de l'Amérique triomphante de l'après-guerre cherchait à gommer à tout prix. Le Canada, c'est pour Dell la porte vers l'autre, le lieu qui lui permet de voir son univers, qu'il croyait le seul possible et le seul véritable, selon une perspective nouvelle. 
Canada est un roman de la traversée des frontières et de la perte de l'innocence, sans doute un chef-d'oeuvre, déjà un classique. 

Il a fallu que j'entende beaucoup parler du Canada de Richard Ford avant de me décider à le lire. C'est le 7 novembre dernier, lorsque j'ai  appris qu'il avait reçu le prix Femina étranger que je m'y suis finalement résignée. En effet, j'ai été charmée par les romans ayant reçu ce prix par le passé, alors pourquoi ne pas tenter le coup avec Canada

Le roman ne m'a pas emportée dès les premières pages, mais il a tout de même rapidement piqué ma curiosité. L'écriture de Richard Ford est à l'image de celle de certains grands auteurs américains (Steinbeck ou Philip Roth, entre autres) qui nous font découvrir de grands espaces mais aussi l'échec du rêve américain.

Canada raconte l'histoire de Dell Parson, un jeune américain de années 1960 qui n'aspire à rien d'autre qu'à mener une vie paisible, à jouer aux échecs tout en réussissant à l'école. Son existence, qui semblait immuable, est chamboulée lorsque ses parents braquent une banque. Ce crime force Dell à faire face à des situations imprévues et troublantes, mais surtout, cela l'amène à se questionner sur son identité et sur son avenir. 

Canada pose ainsi un regard intelligent sur la notion d'identité. Que ce soit lorsque le père de Dell lui demande s'il se sent enfant de l'Alabama (p.90), lorsque Dell s'interroge sur la personnalité des criminels; "ça fait drôle de penser que ses parents avaient l'étoffe de criminels. C'est un miracle à l'envers, en somme." (p.71), ou encore lorsque, une fois parvenu au Canada, Arthur Remlinger demande à Dell s'il désire changer de nom.


"La seule fois que j'avais rencontré Arthur Remlinger et avais véritablement échangé deux mots avec lui, il m'avait demandé - en plaisantant à moitié - si je ne voudrais pas changer de nom. J'avais décliné la proposition, comme n'importe qui à ma place, mais surtout moi qui voulait m'accrocher à mon identité et à ce que je savais de moi-même lorsque cette question faisait débat. Mais là, dans mon cagibi sous l'auvent, je me disais qu'Arthur Remlinger connaissait peut-être quelque chose que j'ignorais. À savoir que, si notre mission à tous, dans ce monde, était d'acquérir de l'expérience, il était nécessaire, et je l'avais pensé, de devenir quelqu'un d'autre." (p. 353)

Canada, c'est une grande épopée, c'est la conquête de l'ouest et la conquête de soi. Canada c'est un roman qui vous fera réfléchir et que vous serez heureux d'avoir lu. 

Richard Ford, Canada, Boréal, 2013. 

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